Le constat est facile à observer, travailler bien ou mal apportera à peu de chose près le même niveau de rémunération. Certains verront ici un raccourci un peu facile voire simpliste, et il est certain que toutes les entreprises ne peuvent pas être mis dans le même panier. Cela semble pourtant être une tendance assez forte depuis plusieurs années, les salaires sont lissés dans la durée (sauf promotion interne sur un autre poste).
On est encore dans les périodes des entretiens annuels, ces rendez-vous permettent de faire un bilan de l'année écoulée et de fixer les objectifs de l'année à venir. C'est aussi le moment où le salarié espère obtenir une augmentation s'il considère avoir bien travaillé (ou bien simulé son travail).
Mais voila dans beaucoup d'entreprises, la politique RH va limiter les hausses à 2.5%, 3% ou des niveaux de ce type. Bien sur que l'on gagne 25k€/an ou 70k€ … 1 ou 2 ou 3 % n'ont pas la même matérialisation sur la fiche de paye mais globalement cela reste des augmentations basses qui ne font que suivre les hausses du coût de la vie (mais pas celle des impôts et taxes).
Au-delà du pourcentage et de la somme que cela représente, l'augmentation annuelle est un symbole pour le salarié, une forme de reconnaissance de sa hiérarchie pour le travail accompli. Et c'est ici que je trouve ces politiques d'augmentations plafonnées tristes, et cela va rejoindre mon titre et l'accroche de mon article.
Concrètement sur une augmentation possible comprise entre 0 et 3%, où est la valorisation du bon salarié face à un tire-au-flanc ? Au pire des cas le mauvais collaborateur n'a aucune augmentation, mais dans certains cas, de manière à ne pas susciter un conflit "ouvert" l'augmentation est juste plus faible que pour d'autres collaborateurs qui ont "performé" (puisque c'est un terme à la mode).
Il n'est donc plus question de valoriser les salariés "modèles", qu'ils soient toujours présents, qu'ils dépassent leur temps de travail sans se faire rémunérer en heures supplémentaires, qu'ils s'investissent corps et âmes dans les projets sans se dire "bon ça dépasse le cadre de mes fonctions donc je ne fais pas". Dans le meilleur des cas, on leur donne le pourcentage maximum par rapport à celui dont l’absentéisme ou les retards répétés sont connus de tous, ou celui qui ne bosse que le minimum pour assurer son poste. Il faut croire que comme pour la téléphonie mobile ou les assurances, la fidélité ne paye plus, pour avoir une hausse de salaire il faut changer de boîte / métier.
L'herbe n'est pas plus verte ailleurs (loin de là) et vous serez surement face à la même politique en terme de "négociation" annuelle, il est donc important de négocier son salaire avant d'intégrer la nouvelle société car dites-vous bien qu'après il sera trop tard (sauf promotion interne reconnue, et pas juste l'assignation de tâches supplémentaires pour le même prix). A mon sens, il est fini le temps où l'on pouvait réellement évoluer dans la même structure (du poste de secretaire à celui de responsable par exemple), et où les compétences et le bon travail pouvaient se retrouver récompensés par un nouveau statut dans l'entreprise et une hausse de salaire en conséquence.
On en vient presque à se demander : "pourquoi je me bats ?", la conscience professionnelle n'a donc plus de valeur ? Apparemment non… donc pourquoi ne pas tous devenir des "mauvais" salariés ? Après tout si à salaire égal on peut en faire le moins possible, c'est tentant non ? Je vous laisse visualiser ce que donneraient des entreprises dont l'ensemble des salariés ne feraient que ce que bon leur semblent… vous voyez un peu la catastrophe annoncée (en fait cela ressemblerait à la classe politique, vous ne trouvez pas? oups !). En tout cas on ne peut pas baisser les bras, du moins pas quand on veut avoir bonne conscience.
Une politique salariale ne doit plus se limiter à des chiffres et des pourcentages, le capital humain est un actif immatériel important dans la valorisation de l'entreprise au même titre que les clients. Des salariés dont le travail est apprécié et reconnu participeront à la bonne marche de l'entreprise, peu importe les difficultés et parfois les sacrifices à concéder, c'est un des moteurs les plus puissants. Mais force est de constater que les entreprises modernes préfèrent avoir du turn-over plutôt que de gérer le personnel existant, sachant que le risque est important de se retrouver à embaucher des salariés non formés (et peut-être non performants) qui reviendront plus chers que ceux qui détiennent l'expérience et la motivation… cherchez l'erreur !
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